Par Les Echos.fr - Publié le 24.07.2022
Affichant dans le contexte nébuleux du moment des promesses alléchantes de gain tout en protégeant le capital investi, les fonds structurés attirent autant qu'ils intriguent. « Il s'agit d'une alternative non pas au livret A mais plutôt aux fonds actions dont la valeur ajoutée, en termes de rapport rendement-risque, repose sur une ingénierie financière élaborée », résume Brice Gimeno, président fondateur de DS Investment Solutions, une société du groupe Primonial dédiée aux produits structurés.
Avant souscription, un décryptage s'impose pour mieux comprendre la mécanique de ces supports atypiques.
1. Pourquoi parle-t-on de fonds « structurés » ?
Proposés par tous les réseaux financiers - standards ou patrimoniaux - dans le cadre fiscal d'une assurance-vie, d'un contrat de capitalisation, d'un plan épargne action (PEA)ou d'un compte titres classique, ces fonds ont pour objectif commun de restituer, à une échéance préfixée, la mise de départ de l'investisseur (nette des frais de souscription)majorée d'une performance conditionnée par l'évolution d'un indice boursier ou d'un panier de valeurs.
Pour ce faire, ces offres commercialisées pendant une période limitée (de quelques semaines à plusieurs mois) associent, dans un savant dosage ajusté au contexte financier, l'achat de produits de taux (protection du capital) à des prises d'options(booster de performances). « Ce caractère composite permet d'actionner différents leviers pour s'adapter à toutes les configurations de marché », observe Emilie Chauvet, directrice des solutions d'investissement et du marketing de Société Générale PrivateBanking France.
2. Quels sont les différents types d'offres ?
On distingue deux grands groupes de fonds structurés ouverts aux particuliers : ceux qui délivrent de la performance uniquement à échéance, et ceux dits « de rendement » qui génèrent un coupon et ménagent, dans leur version «autocall», des fenêtres régulières de remboursement anticipé. Partant de cette base, les variations sont multiples mais quelques tendances dominent .Ainsi, avec la chute des taux de ces dix dernières années, la garantie totale du capital à échéance est devenue extrêmement coûteuse en termes de rentabilité et la plupart des offres, avec ou sans possibilités de sortie anticipée, se contentent de protéger l'investissement de départ jusqu'à un certain seuil de baisse - prédéterminé - de leur indice de référence.
En contrepartie, les promesses de gains grimpent. « La volatilité actuelle des places financières liée, notamment, aux tensions inflationnistes et aux changements de trajectoires monétaires qui se dessinent, est propice à la composante optionnelle des fonds structurés et favorise des paramétrages potentiellement plus performants »,explique Emilie Chauvet.
Résultat : les performances annoncées dépassent fréquemment la barre des 5 %. Quant aux paris pris précédemment dans des contextes déjà turbulents, ils se révèlent souvent gagnants. « L'offre LCL Autocall Vie 2020 lancée au premier trimestre 2020 et dénouée le 28 mars dernier a délivré une performance de 13 % correspondant à un rendement brut annuel de 6,28 % », indique-t-on par exemple chez LCL Banque Privée.
3. Quels sont les leviers de performance ?
Quel que soit le type de fonds proposé, l'effet turbo dépend principalement de quatre facteurs : la durée de placement, le sous-jacent du montage, la barrière de rappel(quand et à quel niveau de valorisation boursière s'enclenche la possibilité de remboursement anticipé) et le niveau de protection du capital.
Dans le contexte actuel, les durées initiales de placement ont tendance à s'allonger (jusqu'à douze ans parfois). « Plus le terme est lointain, plus le coupon et la probabilité de la réalisation de la promesse sont élevés », confirme Brice Gimeno. Parallèlement, au-delà d'une période incompressible d'immobilisation (un an en général),la cadence d'ouverture des fenêtres de rappel des fonds autocall s'accélère, passant, dans nombre de cas, à un rythme semestriel, voire mensuel ou hebdomadaire (et quelque fois quotidien) pour certaines offres haut de gamme. Quant au seuil de baisse en deçà duquel le placement devient perdant à terme, il ests ouvent fixé à -50 % ces derniers temps. A noter, certains fonds maintiennent le versement de coupons en cas de repli limité de leur référent boursier (-10 % ou -20 %par exemple).
4. Sur quels sous-jacents repose la structuration ?
Dans la plupart des cas, le produit structuré prend la forme d'un EMTN (Euro Medium Term Note), un titre de créance, assimilable juridiquement à une obligation, émis en général par une banque ou une compagnie d'assurances. Bénéficiant d'un processus d'agrément moins contraignant que celui d'un fonds commun de placement (FCP) « à formule », l'EMTN présente un risque de défaut de l'établissement émetteur qu'« il convient de ne pas négliger en vérifiant la réputation de la signature proposée », note Brice Gimeno.
Quant à la promesse de gain, elle peut selon les cas s'arrimer à des indices « simples » (CAC 40, EuroStoxx 50) ou « retravaillés » afin de tirer le meilleur parti d'un univers d'investissement (en intégrant notamment les dividendes).Certains fonds s'appuient par ailleurs sur un panier de valeurs. Il est alors recommandé de bien vérifier le mode de calcul de performance du panier : moyenne plus ou moins lissée, etc. D'autres sont construits sur un support intermédiaire (Sicav, fonds de fonds)ouvert sur un univers élargi d'actifs, ce qui a le mérite de ménager « plus de latitude pour générer de la performance qu'un choix figé de quatre ou cinq titres », note Brice Gimeno.
5. Quels sont les frais ?
La multiplicité des acteurs - concepteur, émetteur, distributeur - impliqués dans la production de ce type de fonds, favorise des surcouches de frais de gestion d'autant moins visibles pour le souscripteur qu'ils sont d'emblée intégrés dans la structuration du fonds sur la base de la durée du placement (des frais annuels de l'ordre de 0,5 % à 1 % selon les offres correspondent sur dix ans à une ponction initiale de 5 % à 10 %). A cela s'ajoutent parfois des droits d'entrée supplémentaires et les frais (sur versement, pour la gestion) propres à l'enveloppe (assurance-vie, compte titres) dans laquelle se niche le support.
Trois pièges à éviter
1. Confondre promesse de gain et rendement réel
Le rendement actuariel annuel net (après frais, fiscalité et prélèvement sociaux) que génère le fonds si les marchés sont bien orientés est systématiquement inférieur au gain énoncé (un taux affiché de 5 % correspond à un rendement actuariel net de l'ordre de 3 %).
2. Minimiser la prise de risque
Le versement du coupon comme le remboursement à échéance dépendent de l'orientation de la Bourse et on ne peut jamais écarter l'hypothèse d'une chute durable des marchés qui se solderait pour le souscripteur par une perte sèche en capital (le raisonnement vaut pour un déblocage anticipé).
3. Négliger de lire la notice d'information
Obligatoire et indispensable, ce document liste les avantages et inconvénients du produit, détaille les sous-jacents, décrypte le mécanisme de remboursement, précise les conditions de sortie avant terme et surtout simule plusieurs configurations de gains selon l'évolution des marchés.
À noter
La fiscalité d'un fonds structuré dépend du cadre dans lequel il est souscrit : assurance-vie, bon de capitalisation (gains soumis à un prélèvement libératoire dégressif selon la date de retrait et aux prélèvements sociaux), PEA (revenus exonérés au bout de cinq ans mais prélèvements sociaux dus) ou compte titres classique (flat taxde 30 %).
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